[Cinéma] BAKER Sean (1971-)

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Red Rocket (2021)


Red Rocket (2021)

Sean Baker continue à explorer les laissés-pour-compte de la société américaine et les personnages issus de ce milieu appauvri qui tentent de s’échapper à travers leurs illusions. Son sujet, un ancien acteur porno déchu qui revient dans son bled paumé du Texas et qui squatte la maison de son ex et de sa mère en attendant de pouvoir s’échapper de ce retour à la case départ, est un moyen pour le cinéaste de faire le portrait de l’angle mort d’une Amérique marginale.

Comme dans The Florida Project, on retrouve cette forme d’énergie vivifiante et en même temps désespérée de personnages en quête d’une perspective d’avenir. Ici, ce ne sont pas les à-côtés de Disneyland, mais un territoire industriel désertique avec des diners aux néons multicolores (le diners à beignet où se trouve la nymphette est comme un petit lieu de fantasme qui donne l’illusion de s’en sortir à son personnage alors qu’il est seulement entouré d’un désert sans horizon). Espace de non-lieu, il représente la situation incertaine de son personnage, grand mythomane, excessif, instinctif, exaltant, épuisant, entrepreneur, qui vend du rêve et a des idées de grandeur, mais aussi d’un pays en pleine campagne présidentielle où l’on ne sait plus qui croire.

Le film est haut en couleur et en même temps laisse le temps de déplier son récit et de poser les événements pour en exposer toutes les facettes authentiques de sa communauté. Ayant une forme de naturalisme cru et de spontanéité prise sur le vif avec ses longs dialogues autant drôles, émouvants qu’éreintants, l’œuvre est surtout d’une précision et d’une grande minutie comme le montre le sens du raccord et du montage qui créent des effets de surprise continuels collant à la fantaisie pop, bigarrée et surprenante du long-métrage. Baker privilégie également les grands espaces et le Scope dans un mouvement continuellement statique (pourtant dans un milieu clos où le personnage tourne en rond dans des paysages cycliques qu’il traverse souvent en vélo) afin de mieux filmer le rapport critique entre les protagonistes et l’environnement dans lequel ils doivent survivre. Finalement, c’est une quête impossible pour le personnage qui, malgré tous ses efforts, retourne à une nudité originelle.


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