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Le jour de la bête (1995)
Perdita Durango (1997)
Le Jour de la bête (1995)
Le Jour de la bête prend les contours d'une farce grasse et irrévérencieuse où un prêtre catholique traverse les rues madrilènes pour tenter de tuer le Diable car l'antéchrist est censé venir le jour de Noël. C'est une œuvre de genre audacieuse, qui prend au pied de la lettre son concept entre réalisme et fantastique. Les deux voies sont totalement possibles : cela est-il bien réel ou est-ce le fruit de l'imagination d'un Don Quichotte moderne, pensant vraiment se battre contre des êtres maléfiques ?
Pour parfaire à cette problématique, l'auteur embrasse le style de la comédie horrifique et propose une forme savoureuse et acide, mais aussi morbide et outrancière. Les personnages sont complètement décalés et le lien entre eux sont délirants : un prêtre qui s'aide d'un sidekick métalleux bien vulgaire et d'un animateur d'un show TV soi-disant spécialiste d'ésotérisme, mais imposteur à souhait. Les situations le sont tout autant comme le démontre la démarche très prosaïque du prête, obligé d'être dans le péché pour essayer de communiquer avec le Diable ou encore le regard objectif porté sur les rites sataniques, les visions sous LSD et les messages cachés dans des musiques de Death Metal.
Le rythme est sans concession, car la quête loufoque du prêtre est sans temps mort et arrive toujours à surpasser en matière de folie la scène précédente. Le film frôle la surenchère mais maintient un cap idéal dans l'accumulation des gags, du gore et de l'horreur. Sous cette surface barrée, se cache un message profondément iconoclaste et satirique sur un monde construit sur le mensonge et axé sur la fausse image (notamment à travers la critique virulente de la télévision : la population reste collée devant et croit tout ce qu'elle voit ou entend) mais aussi sur une société encore sous l'emprise d'une grande violence extrême car le vrai Malin se cache sous l'apparence d'un groupuscule mafieux et d'un capitalisme rongeant les plus défavorisés.
Perdita Durango (1997)
Perdita Durango est une œuvre cinglée et déjantée, un énième Bonnie and Clyde, mais cette fois-ci à la dimension latine. La féline Perdita rencontre le braqueur de banque et sorcier Romeo, et parcourent ensemble la frontière américano-mexicaine à la recherche de butin en kidnappant deux adolescents qui vont perdre leur innocence.
Iglesia apporte sa touche horrifique et grotesque mais dans un registre plus humain et réaliste. Tout de même, le style du cinéaste reste outrageusement subversif et va au bout de son poème macabre baigné d'humour noir et de romantisme chaotique. Le film est même parfois transcendant, à l'image des rites santerias et de sorcellerie que Romeo pratique devant un public en demande de violence et de sang. L'atmosphère poisseuse et brûlante du long-métrage s'accommode parfaitement avec les décors bric-à-brac, exotiques, fétichistes, folkloriques et désespérés qui lorgnent ce voyage insolite. Le film ne s'attache à aucune morale et fait même en sorte de nous attacher à ce duo complètement fou et dangereux, même après des scènes d'un grand sadisme comme de la torture mentale, du viol, des meurtres et du sexe animal.
En effet, leur marginalité provoque un émoi entre d'un côté l'homme joué par Javier Bardem, totalement envahi par sa foi en des pouvoirs élémentaires et sa détermination qui lui épargne aucune peur. De l'autre, la femme interprétée par Rosie Pérez, forte et sans vergogne, mais au fond seule et emphatique pour les autres. L'amour des genres du réalisateur n'est pas que dans l'horreur, car on ressent toute sa gratitude pour le western. Le meilleur exemple se trouve dans les paysages suintants du Mexique et surtout à travers les références à Vera Cruz qui a considérablement marqué Romeo, jusqu'à être incrusté à l'intérieur du long-métrage d'Aldrich avant de mourir. On retrouve également les genres du film noir (les filatures nocturnes, la poursuite du flic antihéros, le trafic de fœtus de la mafia...) et bien sûr le road movie dans cet objet jouissif et sulfureux.
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