[Cinéma] AVILDSEN John G. (1935-2017)

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Rocky (1976)

Rocky V (1990)


Rocky (1976)

Ce premier volet d’une saga légendaire que Stallone a conçu pour en faire une œuvre entre Capra et le Mean Streets de Scorsese contient une mélancolie sur les laissés-pour-compte, ceux vivant dans une pauvreté quotidienne dont il est difficile de sortir. Rocky, contrairement à Rambo, n’est pas un marginal, il appartient à cette masse commune pour qui tout est d’avance déterminé. L'Amérique, encore traumatisée par le Vietnam et en plein combat pour les droits civiques, les délaisse complètement. Les Américains ont donc besoin d'un film qui voudrait renouer avec l'espoir d'individualisme et de réussite après tant d'années de gueule de bois.

 

Ainsi, ce n’est pas un combat uniquement sur les rings, mais en dehors aussi, pour exister en tant qu’individu. Le film émeut par sa modestie, autant dans le protagoniste, qui, avec son cœur d’or, sa naïveté pure, sa maladresse touchante et sa simplicité honnête, s’oppose aux paillettes hypocrites de Creed, un showman qui utilise Rocky comme un moyen de vendre son spectacle clinquant, que dans la réalisation, faisant fusionner le boxeur avec l’ambiance miséreuse et grise de Philadelphie. 

 

Avildsen et Stallone captent la ville sous forme de chronique sociale, y répandant un désenchantement et un réalisme sensible, à la fois austère et âpre, tout en faisant graviter une tendresse portée par l’amour et l’amitié, puis une motivation devenue culte par le montage de l'entraînement et la musique iconique de Bill Conti. C'est pourquoi Rocky est une œuvre émouvante et pleine de panache, de tripes et de détermination dans ses discours, qui veut faire ressentir aussi l’espoir, la volonté et la force nécessaires pour s’élever contre une société qui ne le souhaite pas et une vie qui voudrait nous mettre à genoux.

 

Pour les scènes de boxe, le réalisateur a dû faire preuve d'efficacité à cause de son petit budget. En effet, la grande majorité des plans sont filmés de l’extérieur du ring, à travers les cordes, comme pour créer une distance avec le personnage. Cette distance fait que le spectateur est inquiet pour Rocky, comme s'il était lui-même dans le public de la salle, impuissant face à la situation. Ainsi, la solitude du personnage est renforcée, car, de plus, c'est un homme en qui presque personne ne croit. La boxe en elle-même n’est pas réaliste, mais la sensation de réalisme est présente puisque le film va jusqu’à n’utiliser quasiment aucun bruitage de coup pour mieux faire résonner la violence des rares impacts.


Rocky V (1990)

Retour aux sources pour Rocky, qui revient à l’essence même d’où il vient, c'est-à-dire la rue, après son choix de se mettre à la retraite à cause de sa santé et de la banqueroute financière de sa famille. Le film est très différent des deux derniers, car il reprend la teinte abrupte et réaliste du premier, d’où l’intérêt d’Avildsen à la réalisation. Dans ce volet, il n’y a plus de paillettes, car Rocky se voit moqué et fait face systématiquement à des échecs. L'ambiance de cet épisode est plus pessimiste et désespérée ; la passion ardente du héros, qu’il ne peut plus exercer, devient un démon pour lui et un poids pour sa famille. Tourmenté et en crise, il voit en Tommy Gunn un reflet de lui-même et de son passé glorieux, mais c’est un poison qui le rend aveugle et l’éloigne de son fils. En fait, Rocky essaye de retourner sur le ring sans pouvoir le faire, il se remémore des jours heureux perdus et refuse de voir la réalité. Le combat final entre lui et son poulain, qui s’est laissé attirer par le monde scrupuleux et avare de la boxe, se passe dans la rue. C’est un pur symbole pour accepter sa condition et ouvrir les yeux sur ce qui est le plus important : sa famille. De ce fait, c'est un épisode touchant, montrant un Stallone en plein doute pendant une période où sa carrière est en demi-teinte, le faisant descendre de son piédestal et prouvant, encore une fois, que la saga est un réel écho à l'auteur-acteur lui-même.


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