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La 317e Section (1965)
La 317e Section (1965)
Prisonnier à l’issue de la bataille de Dien Bien Phu, opérateur au Service cinématographique des armées en Indochine et reporter de guerre en Algérie, il est évident de dire que Schoendoerffer sait de quoi il parle à travers La 317e Section. Adaptant son propre roman également, le cinéaste se voit épaulé par le producteur Georges de Beauregard et par le directeur de la photographie Raoul Coutard, binôme réputé pour avoir grandement participé aux révolutions techniques et esthétiques de la Nouvelle Vague. En toute logique, le cinéaste impose un réalisme implacable pour offrir un portrait pétri d’authenticité sur la dureté psychologique et physique de la guerre d’Indochine.
Le film se veut plus radical que ses trois modèles, qui sont Aventures en Birmanie de Walsh, Cote 465 de Mann et la sécheresse du cinéma de Fuller, qui avaient déjà donné une vision âpre et directe de la guerre, sans glorification et sans envolée patriotique. Le film, avec une esthétique de journaliste et de documentaire, dévoile sans concession et avec rudesse l’usure que provoque le franchissement des lignes ennemies, la difficulté d’avancer avec un mourant agonisant sur le brancard, les stratagèmes à adopter pour éviter les embuscades, les affrontements dans des escarmouches chaotiques, le duel contre les intempéries ou encore les déplacements hasardeux dans une jungle suffocante et hostile où l’on attrape la malaria et la dysenterie.
C’est pourquoi nous sommes proches du cinéma vérité, du reportage et de la fiction documentée, dans lesquels la caméra devient un soldat anonyme et intransigeant, ne trahissant pas le réel dans une épuration précise, un jeu somptueux de portraits en noir et blanc mettant à nu l’âme des personnages et une distance qui n’aurait pas déplu à Bresson. Notamment dans ce choix d’acteurs, où deux charismatiques comédiens (Perrin et Cremer) sont entourés par une troupe de soldats incognitos, ce qui renforce l’approche factuelle et sans artifice du projet. Le film montre également le point de vue des perdants à travers ces deux soldats fatigués de mener une bataille perdue d’avance. Pourtant, ils gardent un code de l’honneur et une humanité en regardant en face cette guerre sale et inutilement destructrice, tout comme le réalisateur faisant un intraitable devoir de témoignage.
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