[Cinéma] BAVA Mario (1914-1980)

Annotations

Hercule contre les vampires (1961)

Le Corps et le Fouet (1963)

La Planète des vampires (1965)


Hercule contre les vampires (1961)

C’est avec un péplum que Bava a fait ses premières armes de coloriste étourdissant. Avec ce genre, il s’essaie à diverses expérimentations visuelles flamboyantes et s’amuse à intégrer des contrepoints comiques (passant par le sidekick un peu lourd Télémaque et l'ironie parfois parodique de ce muscle-opera) et de son genre qui fera sa renommée : le fantastique-gothique. Dans cette hybridation très libre des légendes de la mythologie grecque, le cinéaste propose une descente bariolée aux Enfers d’Hadès, afin que le héros Hercule, avec l’aide de Thésée, puisse récupérer une pierre pouvant réveiller sa bien-aimée Déjanire, sous l’emprise du vampirique Prince Lycos. L’aspect carton-pâte et le budget précaire sont maquillés par l’élégance virtuose de Bava, qui crée une atmosphère hallucinatoire et artificiellement poétique dans tous les recoins fumeux que traversent les personnages. Le mélange des genres amène également un aspect horrifique d’outre-tombe avec les morts-vivants ténébreux de Lycos, rajoutant toute la part fantaisiste de ce péplum au récit aventureux fait d'obstacles et de tentations, et qui prouve, par son étrangeté maniériste, le maestro formaliste qu’est déjà Mario Bava.


Le Corps et le Fouet (1963)

Le style épouvante-gothique cher à Bava s'intègre parfaitement dans cette sombre romance post-mortem qui explore les fantasmes et les désirs ambigus d’une femme, hantée par le fantôme de son beau-frère sadique. Sans cesse, le cinéaste joue avec les apparences, reste toujours flou dans ce que croient voir les personnages et le spectateur lui-même. Images mentales ou surnaturelles ? Cela importe peu, le réalisateur travaille avant tout une forme mettant en avant les sentiments ambivalents de la relation sadomasochiste entre Nevenka et Kurt, comme le prouvent les scènes de flagellation qui démontrent cette frontière entre la douleur et l’extase. Toutes les couleurs primaires procurent une charge symbolique (bleu pour la rêverie et le fantasme, vert pour la mort et le cadavérique, et rouge pour la passion et le sexe) et atteignent une certaine radicalité, car le travail du cinéaste s’apparente à de la sculpture. Les personnages sont comme désincarnés face à leur pulsion et quasi-juste animés par les couleurs et auscultés par la mise en scène. Par conséquent, ce poème macabre faisant vent du classicisme horrifique fouille les recoins monstrueux de la psyché de son sujet et ainsi celle de notre personnalité autodestructrice.


La Planète des vampires (1965)

Le space-opera horrifique de Bava aura su laisser sa marque : d'Alien à Refn, le cinéaste insuffle un travail esthétique somptueux et édifie un rythme hallucinogène à son objet. Malgré le vieillissement des costumes ou le peu d’acuité dans les personnages, le film arrive à créer une ambiance colorimétrique sophistiquée. Chaque recoin du vaisseau et de la planète a droit à son spectre de couleur, le choix des décors postmodernes inaugure un délire plastique pointilleux ainsi que l’atmosphère brumeuse, élément représentant l’ennemi qui prend possession du corps des explorateurs. C’est là toute l’ingéniosité du cinéaste : créer une belle ambiance mystérieuse en trompe-l'œil et attiser la rétine et les sens du spectateur avec un budget ridicule. On pourrait critiquer aisément le scénario pas transcendant, mais l’œuvre tient une fatalité certes classique de science-fiction mais efficace : nous ne sommes rien dans l’immensité de l’Univers. Chose représentée par un dernier plan où les parasites supérieurs, après avoir tué tout l’équipage, voient notre Terre comme une planète inconnue et peu avancée.


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