Annotations
Buffet froid (1979)
Tenue de soirée (1986)
Buffet froid (1979)
Buffet froid pousse à son paroxysme le sens poétique de l’absurde en liant, sans logique apparente, les événements de cette histoire entre un homme qui se retrouve à faire équipe avec un inspecteur de police et l’assassin de sa femme. La liberté du récit échafaude un non-sens très ironique où les raisonnements cohérents et le bon sens n’ont plus leur place. Cette ironie est froide et désabusée, comme en témoigne l’architecture urbaine (dont le terrain vague, les chantiers et la tour inhabitée) qui impose une glaciale déshumanisation, ainsi que l’atmosphère lugubre et déserte de la nuit, renforçant cet humour noir désespéré, totalement en décalage avec le réel. Sans cesse, le film inverse nos attentes dans les situations, procurant un comique déconcertant qui joue sur les paradoxes. L’œuvre est un enchaînement de scènes avec une certaine autonomie, progressant en crescendo dans un comique qui devient de plus en plus morbide et étrangement jubilatoire. Elle se tient comme une sorte de cauchemar grotesque et surréaliste, réalisé avec une clarté précise, et offre un reflet sombre et inquiétant de la France bétonnée et de l’annihilation qu’elle impose.
Tenue de soirée (1986)
Tenue de soirée est un film à la verve virtuose, grâce à des dialogues qui jaillissent avec frénésie et à leur placement parfaitement ajusté. Son trio de comédiens met cela en valeur admirablement et porte tous les thèmes riches qu’aborde Blier sur la liberté de vivre notre amour de manière affranchie et l’émancipation sexuelle face aux dogmes de la société. C’est presque sous une forme surnaturelle (l’apparition soudaine de Depardieu, en voyou gentleman et pittoresque, qui bouscule la vie de ce couple à la dérive) et avec une crudité à la fois juste et absolue, que Blier scandalise sans limite une société coincée dans l’ennui, à l'image de toutes les maisons bourgeoises cambriolées par les personnages, renvoyant cette image d'une France matérielle et sans âme. Mais on y trouve une extrême tendresse, malgré le côté déconcertant du sujet et les engueulades qui fusent tout au long du récit. Au final, c’est un film sur la nécessité du bonheur, creusé sans une once de transparence pour mieux atteindre le cœur de la chair et des sentiments.
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